Extrême-droitisation du débat public

Propos liminaires de Glen Dissaux, au nom des élu·e·s écologistes, en ouverture du Conseil de Brest Métropole le 13 décembre 2021, sur le l’extrême-droitisation du débat public et sur le naufrage de nos valeurs.

Extrême-droitisation du débat public et naufrage de nos valeurs

« Monsieur le Président, cher·e·s collègues,

J’aimerais juste vous parler un petit peu d’accueil, d’inclusion et de solidarité.

Nous subissons un débat présidentiel d’une teneur qui est parfois bien rance et détestable, loin, très loin des véritables enjeux. La France s’engage dans un débat sur les « bons » prénoms que les enfants français devraient porter, les « bonnes » pratiques religieuses, les « bonnes » orientations sexuelles, la « bonne » couleur de peau, ou de s’il faut aimer telle ou telle chose pour être considéré·e comme Français·e. Cette pente dangereuse, nous la descendons à pleine vitesse, dans un contexte de populisme migratoire et de xénophobie de plus en plus décomplexée.

Les écologistes appellent à mettre un terme au naufrage de nos valeurs.

Il y a 3 semaines, 31 personnes sont mortes en mer, au large de Calais. Ces personnes sont mortes en attendant les secours qu’elles avaient appelés mais qui ne sont pas intervenus à temps, les services français et britanniques se rejetant la balle. Cette tragédie est loin d’être la première mais elle est encore plus proche de nous. Depuis le 1er janvier 2021, les parcours migratoires à travers la Méditerranée et l’Europe ont fait un décès toutes les 4h30. L’horreur de cette horloge macabre doit nous alerter.

Les atteintes aux droits les plus fondamentaux menacent notre Etat de droit et salissent la tradition d’accueil et d’hospitalité de notre pays.

Nous avons, dans le pays de Brest, une immense tradition maritime. Pour les gens de mer, la solidarité ce n’est pas un vain mot. Des communes de la métropole brestoise ont contribué à aider SOS Méditerranée ou la SNSM notamment. Les écologistes en avaient fait un cheval de bataille à Brest l’an dernier.

Nous avons en effet une responsabilité nous aussi, à notre échelle, à prendre une petite part de cette solidarité.

Un recentrage du débat national sur les sujets qui comptent nous semble essentiel et urgent : l’urgence écologique, la justice sociale, l’humanisme. Nous pensons qu’un défi immense est devant nous et que nous devons soutenir toutes les initiatives solidaires qui nous relient au monde.

Plaçons la solidarité au centre des actions de nos collectivités : agir pour la diversité, l’éducation, l’émancipation de nos enfants, la liberté de la presse et de la démocratie, l’égalité, la bienveillance, l’ouverture d’esprit.

Il nous faut retrouver nos valeurs, défendre la dignité humaine partout, refuser de nous habituer à voir des hommes, des femmes et des enfants dormir dehors sous les ponts, dans des tentes.

Car l’avenir de la France ne pourra être écrit par les tenant·e·s de la haine raciale, par celles et ceux qui n’hésitent pas à s’entourer des groupuscules les plus violents de la jeunesse identitaire. Les images des militant·e·s pacifistes de SOS Racisme tabassé·e·s lors d’un meeting il y a quelques jours font froid dans le dos. Tout comme les images de journalistes exclu·e·s et malmené·e·s.

Les digues qui contenaient les discours et les idées de l’extrême droite française ont sauté. Le contexte est funestement porteur pour les idéologies réactionnaires, violentes, racistes, patriarcales les plus décomplexées.

Et il faut finalement que ce soit au Pape, représentant du catholicisme dont l’extrême droite française ne cesse de se revendiquer, de condamner la semaine dernière un naufrage de civilisation et de rappeler nos devoirs d’humanité face aux exilé·e·s et la chance aussi qu’a toujours constitué à travers tous les âges de l’humanité l’immigration.

Car de quoi avons-nous peur ? Non, l’immigration n’est pas un problème. Oui, dans la nature comme dans l’humanité, la diversité est vitale. Et oui, nous nous battrons toujours contre l’oubli, le révisionnisme, la haine et la violence.

Alors vous avez peut-être vu passer l’étude solitude 2021 de la Fondation de France :

  • Une personne sur quatre est seule dans notre pays.
  • Un·e jeune sur cinq est isolé·e, ça a explosé depuis deux ans.
  • Les jeunes se sentent inutiles, seul·e·s, abandonné·e·s.

Moins de cohésion sociale, moins de considération, moins de possibilité, moins de liberté, et ce n’est pas seulement dû à la crise de la covid.

Retisser du lien entre nous sera un des enjeux majeurs et nécessitera d’irriguer toutes nos politiques pendant un certain temps, nous en sommes convaincu·e·s.

Et permettez-moi de croire que notre inhumanité au regard des migrant·e·s n’est pas sans lien avec notre incapacité à considérer notre voisin·e. La fermeture des frontières et le repli sur soi est devenu l’horizon politique de celles et ceux qui préfèrent agiter des paniques identitaires plutôt que de réparer nos sociétés fragilisées par la crise sociale.

Les écologistes et les humanistes refusent cet affaissement de la pensée et l’abandon de nos valeurs qui consisterait à toujours chercher des coupables plutôt que des solutions.

L’histoire nous l’enseigne, renier les droits de l’autre c’est toujours abandonner sa propre liberté. Notre pays doit retrouver ses valeurs d’accueil, de justice et de solidarité. Ce sont bien ces valeurs qui nous permettent de construire l’avenir ici sur notre territoire comme de toute l’humanité.


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