En liminaire du Conseil municipal du 1er juillet 2025, Marion Maury, en tant qu’élue à l’action sociale, a exprimé ses craintes quant à l’éparpillement de l’action du département. Alors que tant d’acteurs de la solidarité sont en difficulté et que les besoins sociaux explosent, elle invite les collectivités à respecter les « blocs de compétences ».
« Madame la Première adjointe, cher-ère-s Collègues,
Vendredi dernier, la Cour des Comptes publiait son rapport annuel sur la situation financière des collectivités territoriales telle qu’elle résulte de l’examen de leur compte de l’année 2024. Dans un contexte où la dette publique, c’est du jamais vu, atteint 114 % du PIB.
En tant qu’élue à l’Action Sociale, je souhaiterais relever particulièrement l’analyse de la situation financière des départements qui se dégrade, car elle impacte nos politiques de solidarité et de soutien financier aux associations de solidarité présentes sur notre territoire.
Ce rapport de la Cour des comptes, dit que la composition des recettes des départements est inadaptée à celle de leurs dépenses. Pris globalement, les départements connaissent une situation financière défavorable. Elle résulte de l’effet de ciseaux lié à la chute des recettes des droits de mutation en 2023-2024 après plusieurs années de hausse accélérée, et à la dynamique de leurs dépenses sociales, sur laquelle les départements ne disposent que de peu de leviers d’action.
La Cour des comptes précise, « il est peu rationnel que des recettes aussi cycliques et volatiles assises sur le cycle économique contribue au financement de dépenses aussi rigides et dynamiques que les dépenses sociales ». Dépenses sociales structurelles comme celles liée au vieillissement démographique quand la quasi totalité des EHPAD publics ne sont pas à l’équilibre aujourd’hui. Mais aussi dépenses de handicap, quand aujourd’hui dans nos missions locales, 1 jeune sur 10 a une RQTH. Ou de lutte contre la pauvreté sur laquelle nous nous sommes engagés et qui a amené la ville de Brest le 19 juin dernier à présenter à Brest un projet territorial des solidarités pour rappeler nos engagements.
En tant qu’élue à l’Action sociale, je m’inquiète de ce contexte, car il a des effets concrets actuellement dans notre territoire parmi lesquels la non compensation du Ségur pour les associations finistériennes du secteur social et médico-social.
Plusieurs associations agissant à Brest sont aujourd’hui en grande difficulté, dans l’attente de la compensation des dépenses du Ségur, pour tous par le département du Finistère. Mais à décharge, les départements eux-mêmes sont en attente de la concrétisation des engagements de l’État à leur compenser cette dépense. En avril dernier, l’État s’engageait à compenser la moitié seulement de ce Segur estimé à 170 millions d’euros pour la part départementale de tarification des établissements sociaux et médicaux-sociaux associatifs. Cette réforme du Segur visait à revaloriser les salaires et rendre plus attractifs ses métiers sans compensation. Elle produit l’effet inverse de plonger des associations, certaines associations dans des difficultés de trésorerie importantes et dans des suppressions d’emploi.
En bout de chaîne, ce sont les publics qui ont besoin de solidarité qui en souffrent. Ainsi, nous avons vu à Brest disparaître récemment l’auto-école sociale, le garage solidaire, des supports d’insertion ou de soutien à la santé mentale. Alors, quelle est grande cause nationale ? Nous avons vu encore récemment le CIDDF tirer la sonnette d’alarme, mais nous en avons déjà échangé dans cette instance. Nous avons vu des EHPAD publiques fragilisés. La très grande majorité des EHPAD publiques dans notre pays sont en déficit et le secteur du handicap l’est aussi sur le volet des dépenses d’hébergement.
Il me semble dans ce contexte tendu, regrettable de constater qu’alors que tant d’associations sont en difficulté, que le CCAS de Brest a vu lui-même son financement départemental diminuer de moitié l’année dernière et être en suspens pour cette année, il me semble regrettable de constater la tentation de dispersion de l’action publique locale dans des champs qui ne sont pas les siens.
Je pense à la dépense annoncée la semaine dernière par le conseil départemental à des fins de politique de sécurité de soutien à la vidéosurveillance ou à la police municipale des maires qui en est un exemple. Là où nous avons tant besoin du chef de file de l’action sociale qui est le département, dans les compétences qui sont le cœur de son action. Car à Brest aussi, nous avons besoin du département à nos côtés comme vrai partenaire chef de file de l’action sociale. Car la métropole concentre la pauvreté comme le pendant naturel de son attractivité.
En temps de disette budgétaire, nous n’avons pas fini de débattre sur la répartition et le respect des compétences de chacun, car nous n’aurons plus les moyens de saupoudrer et de nous disperser. Et ce débat concerne tous les niveaux de collectivité, pas seulement le département. Ce débat nous concerne. Le législateur a fixé des orientations et des chefs de file pour organiser cette action publique et éviter que nous nous dispersions sans cohérence. Alors cette architecture, nous le savons, est imparfaite mais elle a le mérite d’exister. Les tensions budgétaires vont en éprouver la cohérence encore plus dans l’avenir. Conséquence de la dette publique, encore davantage qu’hier, gouverner, c’est choisir et ne pas saupoudrer et ne pas se disperser. Merci mes cher-ère-s collègues. »
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