Programme de tranquillité, de sécurité urbaine et vidéosurveillance

Intervention de Glen Dissaux, au nom des élu·e·s écologistes, lors du Conseil municipal de Brest le 9 décembre 2021, sur le programme de tranquillité, de sécurité urbaine et vidéosurveillance.

« Cher·e·s collègues,

La gestion de la tranquillité publique et de la protection des populations a évolué et nous sommes confronté.e.s, à Brest comme ailleurs, à de nouvelles formes de délinquance. C’est un fait.

Pour sortir de la démagogie et des caricatures, il est bon de mettre des chiffres et des réalités sur les phénomènes dont nous parlons, afin de ne pas céder à l’idéologie et au glissement droitier et sécuritaire imposé par certains chantres du repli sur soi.

Soyons pragmatiques.

A cette délibération est annexé le diagnostic local de sécurité, auquel s’adosse la convention de sécurité intégrée que vous avez signée, Monsieur le Maire, avec le représentant de l’État, le 25 novembre dernier. Je tiens s’il vous plaît à citer rapidement quelques éléments de ce document pour contextualiser les propos de ce soir et faire écho à la façon dont certain·e·s dépeignent notre ville.

Tout n’est pas rose, loin s’en faut, nous avons de véritables défis en particulier avec une hausse des violences sexuelles, de
certaines violences physiques, des incendies volontaires, le trafic de stupéfiants etc.

Mais le constat est aussi le suivant :

  • stabilité des atteintes volontaires à l’intégrité physique
  • recul sensible des violences physiques crapuleuses
  • diminution significative des atteintes aux biens
  • stabilité des destructions/dégradations
  • fort recul des cambriolages de logements, …

Donc gardons une certaine mesure. Il ne s’agit pas de nier les difficultés liées aux violences dans les quartiers et au centre ville. Nous les connaissons, la police les connait, elles sont majoritairement dues à une nouvelle forme de délinquance, aux divers trafics, à la précarité aussi.

Nous devons nous attaquer avec force et efficacité à ces problèmes, dans une démarche globale, partenariale, équilibrée entre la prévention et la répression. Mais nous disons qu’il y a des réalités statistiques, des réalités de terrain à considérer : soyons pragmatiques. C’est comme cela que nous allons améliorer le quotidien des Brestoises et des Brestois.

Comment être efficace en la matière, sans dogmatismes, sans idéologie ?

Permettez-moi de croire que nous en avons proposé quelques pistes dans le programme municipal plébiscité par les brestoises et les brestois l’an dernier.

Je reviens un court instant sur les principales recommandations de ce diagnostic local de sécurité, qui sont les suivantes. Travailler en priorité sur :

  • La prévention des conduites addictives (notamment l’alcool et stupéfiants)
  • La problématique de la santé mentale
  • La prévention et la lutte contre les violences, notamment les violences intrafamiliales
  • La régulation des usages de l’espace public
  • Créer un groupe de suivi des situations individuelles à l’échelle des quartiers.

Nous sommes d’accord avec tout cela. La majorité a montré ses ambitions sur tous ces points.

J’en arrive au lien avec le contenu de la convention de sécurité entre l’État et la ville de Brest.

J’ai eu l’occasion de le dire au nom des élu.e.s écologistes, que nous pensons premièrement que la méthode est indigne et s’apparente à une forme de chantage inacceptable de la part de l’Etat.

Car finalement que contient cette convention ?

Un préalable sur lequel nous serons tous et toutes d’accord : le
renforcement d’une action conjointe entre l’État et la ville pour traiter de la sécurité des brestoises et des brestois au quotidien. Des engagements réciproques donc, et une collaboration réaffirmée.

Des engagements donc, mais qu’y a t-il de nouveau ?

Du côté de la ville notamment :

– La création de la brigade de tranquillité urbaine, portée progressivement à 25 membres
– L’augmentation du nombre de médiateurs urbains pour passer à un total de 15
– La construction de nouveaux locaux pour la brigade cynophile de la police
– La pérennisation des vacations de médecins au commissariat
– Le renforcement des actions d’aides aux victimes et la création d’un lieu d’accueil, dédié à toutes les victimes, regroupant les ressources du territoire

Ce sont là nos engagements de campagne, notre programme politique que nous réaffirmons ici. Nous nous sommes engagé.e.s et nous le ferons, en réaffirmant que seule la présence sur le terrain, le travail croisé en amont avec les acteurs de l’éducation et de la prévention porte ses fruits.

En nous attaquant aux violences intrafamiliales, aux violences sexuelles, au harcèlement de rue, aux dégâts faits par cette société patriarcale, inégalitaire, violente, dont les coupables jouissent d’une immunité révoltante.

C’est cela sortir des caricatures, de l’idéologie et être pragmatiques. Regarder et analyser les réalités et proposer des solutions concrètes.

Du côté de l’État par contre, on peut déplorer que le renforcement des effectifs de police à Brest, demandé de longue date n’est pas chiffré, et que le déploiement de la vidéosurveillance sur l’espace public ne précise pas les engagements financiers d’installation, de mise en place, de
gestion, de maintenance, de fonctionnement…

Tout cela pourrait être presque acceptable s’il n’y avait cette question, centrale, et seule véritable nouveauté finalement, des caméras.

Certes, il en existe déjà, pour des usages circonstanciés, la protection fonctionnelle de bâtiments, le trafic routier, les transports, mais on parle là de quelque chose de radicalement différent : la surveillance et le contrôle de l’espace public.

Nous n’acceptons pas de céder au chantage du gouvernement qui nous impose une solution d’idéologue en dépit du bon sens et de toutes les études.

Je vous invite vraiment à lire les études. Nous devons répondre aux réalités vécues par nos concitoyen.ne.s, pas aux injonctions
sécuritaires
.

Mettre le doigt dans cet engrenage est extrêmement coûteux : on veut toujours plus de caméras, placées différemment, plus modernes, à plus grand angle, les coûts explosent à chaque fois !

Et cela au détriment des fonctionnaires de police de terrain et de leurs conditions de travail évidemment. C’est un gâchis de ressources.

C’est inefficient. Les images servent très marginalement dans les élucidations : 1 à 3% des crimes. La Cour des Comptes formule dans un rapport d’octobre 2020 qu’il convient d’engager une évaluation de l’efficacité de la vidéo protection de la voie publique, notamment dans l’élucidation des crimes et délits. Toutes les données montrent que cette aide des caméras est marginale. Et l’évaluation des dispositifs est largement défaillante.

C’est très risqué en termes de protection des libertés individuelles. La CNIL souligne que « le développement de ces dispositifs intrusifs présente le risque d’engendrer une surveillance accrue des citoyen·ne·s, susceptible de
porter atteinte au bon fonctionnement de notre société démocratique ».

Et c’est ce qui se passe en réalité, on glisse sur un contrôle comportemental, en écartant certaines populations des centres-villes, et renforçant les discriminations, consciemment ou non. Les études là encore montrent le renforcement des ciblages ethniques, et des questions se posent sur la gestion des données.

Les caméras n’ont jamais empêché les délits, au mieux elles déplacent un peu le problème. Au pire elles sont ignorées ou immédiatement détériorées. La surveillance est problématique en soi, et ne peut pas de toute façon être continue.

Les caméras sont inopérantes pour lutter contre les trafics et la délinquance.

En conclusion, nous, écologistes, saluons les engagements de la Ville, réaffirmés dans cette convention, et puisqu’il est proposé au Conseil municipal de vous autoriser, Monsieur le Maire, à mettre en œuvre les actions de la Ville conformément à ses engagements, nous ne pouvons pas être contre l’intégralité de cette délibération.

Les mesures de la ville sont pragmatiques, ancrées dans le réel. Le lieu d’accueil des victimes sera une avancée majeure. La présence de la brigade de tranquillité, des médiateurs et nos politiques de prévention également. La convention a au moins le mérite de rassembler et de rappeler nos politiques vertueuses en la matière.

Mais puisque les sujets ne sont pas présentés séparément, nous
réaffirmons notre volonté d’un engagement fort de l’État et de la police nationale
pour un travail concerté, d’enquête et de présence sur le terrain, nous réaffirmons notre demande de plus de moyens pour les services publics et la justice.

Mais nous refusons la méthode du gouvernement et l’idéologie ultra-sécuritaire et inefficace, nous refusons la gabegie financière que représentent les caméras. Les écologistes ne croient pas à
la vidéosurveillance de l’espace public. Les caméras sont une impasse.

Nous ne voterons pas pour.


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